À l’heure où je vous écris, Marie et moi sommes dans notre appartement tout vide, à 5 minutes du collège. On a signé, et tout est prêt pour recevoir, enfin, notre déménagement. C’est notre cadeau de Noël en plein été (et oui, s’il fait moins chaud, on tient quand même un petit 31 degrés). On a tellement hâte de nous installer vraiment, de pouvoir soigner nos doigts abîmés par les poignées carrées, de ranger définitivement les valises dans la maid-room et de pouvoir profiter de la terrasse ouverte sur Beyrouth.

On a finalement opté pour un appartement au 19ème étage, idéal pour travailler mes décollages en parapente, le problème majeur restant l’atterrissage, vue la densité de la ville… Je me vois déjà travailler mes avions en papier avec Abel, mon petit neveu et filleul, qui sera certainement ravi essayer de viser la piste de l’aéroport qu’on voit au loin.

vue du blacon

À cette hauteur, on domine la ville et les vues sont plutôt chouettes, notre immeuble est dans un quartier calme mais on sent la ville s’agiter sous nos pieds. On est toujours autant étonnés par la diversité et on passe beaucoup de temps la tête en l’air, à visualiser le parallèle entre des immeubles détruits par la guerre qui côtoient des immeubles de luxe.

Notre petite balade le long de la mer, sur la corniche, nous a permis de faire le parallèle avec notre promenade de Tiburon, un peu plus fraîche et un peu moins peuplée. Cela reste un endroit assez plaisant, lieu de rencontre des sportifs et des balades à vélo.

Balade au chant du Muezzin

Dans nos démarches, nous avons visité des quartiers vraiment charmants, comme le quartier de Souk Beirut qui a été rasé puis complètement reconstruit après la guerre. C’est franchement joli, calme, arboré, tout en étant en plein cœur de la ville.

le jardin d’une école …

Ils en ont profité pour installer un centre commercial à l’architecture vieilles pierres très réussi, mais complètement vide car soufflé par l’explosion. L’urgence n’est pas à la reconstruction de ces magasins de luxe, de toute façon vidés de consommateurs devant la crise économique. Ce fût un vrai plaisir d’errer dans ce lieu parsemé de mosaïques romaines, de bâtiments historiques préservés, de très jolies statues et petits jardins. En revanche, notre seule présence dans ces coursives vides a contribué à renforcer une étrange impression … comme de déranger un lieu sacré.

Une chose est sûre, le travail de reconstruction de cette partie de la ville attendra, les habitations et les immeubles de bureau passent avant, ce qui est plutôt logique et rassurant car le beau temps ne durera pas cet hiver. Nous appréhendons mieux l’impact de cette explosion sur les différents quartiers et, même si nous sommes impressionnés par le bouillonnement et le courage des libanais pour reconstruire, il est frappant de constater les stigmates du souffle qui a ravagé des quartiers entiers.

reste du garage Audi
les silos qui ont sauvé une partie de Beyrouth

Nous n’avons pas encore mis les pieds à MarMikaël, le quartier historique arménien avec un cachet fou mais complètement éventré. Nous avons concentré notre énergie sur notre installation et le bien-être familial avant la découverte. De mon côté, le travail ne manque pas avec des formations fréquentes, y compris le samedi, et un travail de coordination de l’équipe de maths du lycée qui doit gérer une situation fluctuante entre enseignement hybride, à distance et on l’espère bientôt présentiel. En ce moment, nous sommes en enseignement à distance en emploi du temps complet. Les enfants subissent cela depuis une semaine et craquent déjà. 8 h par jour devant l’écran, avec une connexion libanaise, c’est vraiment très compliqué. En tant qu’enseignant, je trouve que c’est assez catastrophique et je n’arrive pas à m’imaginer continuer encore longtemps d’exercer ce métier dans ces conditions. On va finir par être optimistes et croire en une immunité générale prochaine … on n’a pas trop le choix. Les gens sont plutôt respectueux du port du masque ici, il faut dire que la Covid frappe durement le Liban en ce moment. Plusieurs collègues sont sur le flanc, quelques élèves aussi. De notre côté, tout va bien. Marie a fait un saut en France le week-end dernier pour récupérer notre malle car la faire envoyer s’avérait bien plus onéreux que l’aller-retour (Transavia 330 euros, si l’idée vous en dit  ). Elle a donc eu droit à son petit curetage de nez et est négative donc on se dit qu’on doit l’être nous aussi. Elle en a profité pour faire le tour de la famille et prendre un petit coup de frais, en plus de quelques saucissons qui n’ont pas fait long feu à son retour.

On n’est pourtant pas mal nourris, avec des restaurants où l’on mange très bien pour 30 euros à 4, dévaluation de la livre libanaise oblige. Cela nous revient presque moins cher d’aller au restaurant que de faire des courses !

Les enfants s’épanouissent ici, avec beaucoup de sourires, ce qui nous rassure beaucoup. Élise a même pris un petit accent libanais qui nous fait bien marrer. Leurs amis ont tout fait pour les accueillir et les acclimater, il ne leur manque qu’une présence quotidienne pour se sentir vraiment bien. De son côté, Marie fait des projets, entre orthophonie à distance et ONG qui ont besoin d’aides et compétences (pour l’instant, elle en vise deux, une d’aide médicale aux sinistrés et une pour promouvoir l’écologie au Liban – il y a du boulot).

Tout se passe pour le mieux donc, et l’appartement a une belle vue sur le collège donc Marie pourra surveiller mes moindres faits et gestes ( 98% de femmes parmi les enseignants de mon lycée) et nous pourrons vérifier que nos enfants sont de parfaits petits élèves, préférant le CDI au farniente dans la cour.

En parlant de farniente, nous voilà allongés sur la terrasse, sans meuble, en attendant le gros rush.

En effet, nous devons avoir l’arrivée de notre déménagement, mais aussi deux livraisons, intervention de plombier et menuisier (car pas trop l’habitude des lave-vaisselles ici … et il est hors de question de nous en passer ! ), travail du gardien pour virer des portes qui vont nous gêner. Tout ça aujourd’hui …  Évidemment, ce petit monde ne parle pas français ni anglais très souvent et on se débat à grands coups de gestes et de Google Trad.

Autant vous le dire tout de suite, ça va être un beau bazar, donc, là, c’est un peu le calme avant la tempête !

Je vous raconte ça très vite, en espérant ne pas avoir de mauvaise surprise dans cette journée marathon.

Bises à tous

3 Replies to “Une si longue attente”

  1. Enfin posés cela fait plaisir de sentir l’enthousiasme des sans meubles
    Dommage que les 330€ ne comprennent pas le transferts depuis FDF
    Joyeuses vacances quand vous en aurez et attention le basejump n’est pas recommandé pour les vieux genoux
    La bises à vous 4

  2. Vous me faites chialer les Shav, et ce chant au bord de l’eau… Juste magique!
    Love U – Miss U
    Tata Nini

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