Une des destinations préférées des américains l’hiver est le Costa-Rica. Développé vers le tourisme intensif mais « respectueux » (il y a quand même deux concepts un peu opposés dans ces deux mots) de la diversité de ce petit pays d’Amérique centrale, infrastructures au top, on paye en dollar et les gens parlent anglais. Bref, un paradis pour américain en mal de soleil et de chaleur en hiver. Conséquence : c’est assez cher et les vols sont hors de prix. Il va d’ailleurs falloir cesser de croire à cet adage comme quoi les vols aux USA sont accessibles. En fait, c’est bien plus cher que chez nous. Par exemple, cela revient moins cher à mes beaux-parents de faire un Paris-SF que de faire un SF-toute destination au soleil à Noël (Hawaï, Miami, Tahiti, Mexique, Amérique Centrale).

Le jour de la prérentrée, une collègue m’avait vanté les mérites du Nicaragua, assez ressemblant et moins cher, mais nous avons trouvé des bons billets pour le Panama, frontalier au sud du Costa-Rica donc c’est parti pour notre semaine de vacances de février ! On se permet de faire rater un jour d’école aux enfants (ce qui ne passera d’ailleurs pas du tout  au niveau de l’école de Baptiste), et on se prépare à passer 10 jours à arpenter les terrains variés de l’isthme (purée, ces souvenirs cours d’HG et le coloriage toujours délicat du Panama – spéciale dédicace à Célinoux et Francis !! ).

On prend donc un red-eye le jeudi soir, c’est-à-dire un vol de nuit, qui, comme son nom l’indique, te bousille la tronche pour au moins deux jours… c’est le sacrifice à faire pour toucher des vols à des prix abordables. Le vol est direct mais, plus ça va, moins j’arrive à dormir dans les avions et donc je ne pars pas très confiant sur mon état à l’arrivée. Nous débarquons à 6h du mat à Panama City, la tête enfarinée et nous découvrons que le taxi promis par la pension n’est pas là. On réalise du même coup que l’anglais n’est pas particulièrement pratiqué et que mon espagnol appris en voyage scolaire à coup de « un zumo de naranja » risque de ne pas suffire. On trouve un taxi pour nous emmener, c’est assez cher mais on est à l’aéroport et il y a « touristes » qui clignote sur nos tronches donc on tente une négociation qui ne fait pas varier le prix d’un iota. On trouve une autre compagnie de taxis un peu moins cher mais ça reste pas donné.

Nous arrivons à la pension que nous avons réservé pour 2 jours et là encore, personne ne parle anglais. On commence à comprendre pourquoi les américains préfèrent le Costa-Rica et on se met à utiliser la bonne vieille technique des mots en français, en roulant les R, et en mettant des o partout et des « el » à toutes les sauces. On finit par nous donner une chambre bien avant l’heure du check in, ce qui est une bénédiction pour que nous puissions nous écrouler jusqu’à 4 h de l’après-midi, épuisés par une nuit blanche ou presque.

En fin d’après-midi, nous nous lançons à l’assaut de la vieille ville de Panama City car le reste n’est qu’une agglomération ultra-engorgée par les bouchons, et dénaturée par le manque de place entre les deux océans qui l’enserre. Du coup, l’urbanisation bat son plein avec des buildings qui poussent comme des champignons sous l’effet de la défiscalisation et du paradis fiscal que constitue le Panama à l’échelle mondiale. C’est pas franchement terrible, ce n’est pas ce que nous sommes venus chercher ici mais, on le savait, Panama City n’étant que le point de départ obligatoire de notre voyage.

La vieille ville est mignonne bien qu’en pleine rénovation, les promoteurs touristiques ont bien compris l’avantage qu’ils pouvaient tirer du charme de ces vieux bâtiments coloniaux. Ça retape donc à tour de bras … Est-ce l’heure de notre visite en toute fin d’après-midi, la météo un peu grise ou le contraste avec la circulation engorgée dans le reste de la ville mais cela nous a apparu un peu mort. On a apprécié de nous promener tranquillement dans ces rues chargées d’histoire coloniale, à l’abri de la foule mais on aurait aussi aimé sentir l’atmosphère des Caraïbes qui est pour le coup complètement absente. 

Le lendemain, on erre dans Panama City, à la recherche de l’atmosphère de la ville et notre première impression se confirme : c’est bruyant, assez peu sympathique et très cher. C’est notre surprise en arrivant car le seul guide touristique que nous ayons pu trouver ne le mentionnait pas. Panama s’ouvre à peine au tourisme, n’a pas de conscience d’accueil développée et le panaméen moyen ne parle pas anglais. Bien sûr, il y a toutes les structures pour les placements fiscaux, banques et autres plate-formes financières mais on ne joue pas dans cette catégorie-là. Et, du coup, nous sommes très étonnés de découvrir que tout est relativement cher à Panama City, transports comme restaurants, dans des prix comparables à la France je pense. On y paye en dollar et l’influence américaine liée au canal est une des explications d’un tel coût de la vie. On renonce à aller voir ce fameux canal car il n’y a pas vraiment de moyen de le visiter (on l’enjambera plus tard) et on se met à faire un peu de shopping car notre cher fils, dans sa parfaite organisation de sa valise, a oublié de prendre des chaussures pour marcher … Là aussi, cruelle désillusion, prix américains.

Le jour suivant, on met les voiles très tôt, à 4h du matin, avec un taxi qui vient nous chercher pour nous emmener aux îles San Blas. C’est un chapelet d’une centaine de petites îles (on en fait le tour en 10 minutes) sur la côte Atlantique, qui constitue un parc national exploité exclusivement par les indiens natifs. Chaque île habitée étant gérée par une famille de la tribu, les orientations sont diverses et il n’est possible d’organiser son séjour qu’à distance sans trop se rendre compte de la réalité de l’île. On s’attendait à voir un paradis assez protégé du tourisme de masse et nous avons été très déçu de ce que nous y avons trouvé. En effet, si les San Blas sont splendides, le décor de carte postale n’est que l’envers du décor. Les population indigènes n’ont qu’une conscience limitée du développement touristique durable, surtout dans ce milieu si fragile, et j’ai peur qu’ils mettent leur habitat en grand danger.

Nous nous attendions à trouver une île avec 6 bungalows et des aménagements très sommaires. Une fois le pied posé sur le sable après 4 heures de route et 1h30 de petit bateau à moteur qui nous a bien rincé d’embruns, nous découvrons une vingtaine de tentes, une dizaine de bateaux au mouillage et une conception assez éloignée de l’image du paradis immaculé que nous nous faisions de ces trois jours à passer sur place. De plus, les indiens ne prennent pas vraiment soin de leur île, le centre de celle-ci servant de zone pour brûler les déchets, les fonds sous-marins sont aussi dégradés par les bateaux au mouillage. Le premier soir, on se retrouve avec une fête jusqu’à pas d’heure des plaisanciers. 

Bref, la déception est de taille avec le potentiel de ces îles qui sont effectivement très belles. Nous étions installés sommairement dans un bungalow à même le sable, les occupations se sont tournées vers les balades, la plongée, l’ouverture des noix de coco, la sieste sur la plage et la lecture (et Élise a expérimenté la dureté du soleil en prenant des coups de soleil assez sévères). L’expérience est donc celle que nous recherchions mais nous pensions être vraiment plus seuls (même si les deux autres jours, l’île s’est bien vidée) et surtout, ça a été une grosse dépense de venir expérimenter l’isolement des San Blas. Ça serait à refaire, nous ne le ferions certainement pas, ou alors en trouvant une vraie île déserte. Le retour s’est avéré un peu plus compliqué car le bateau a eu des difficultés de moteur et la traversée s’est faite au ralenti. Nous sommes donc arrivés tardivement à Panama City et notre trajet en voiture de location pour nous rendre de l’autre côté du Panama, à la frontière costaricienne, où nous avions notre étape suivante n’a pas pu se passer dans les temps.

De plus, on a eu un petit contre-temps avec la maréchaussée locale. En effet, ils avaient eu vent de la venue du beau-f d’FX, ils ont voulu avoir un petit autographe et ils ont tenu à ce qu’on verse une contribution au développement économique du pays. On est sympa donc on a accepté en bonne intelligence … enfin surtout de force. Il n’y a qu’une autoroute qui traverse le Panama, ils roulent tous comme des débiles et du coup, je me suis laissé un peu bercer d’autant qu’il n’y a aucun panneau, et là, dans une descente , pan !! Un motard avec un radar … Ça ne loupe pas, il me fait signe de me mettre sur le côté. J’utilise alors une technique d’FX pour éviter le truc, je me range à 400 mètres de là et il vient donc avec ses petits pieds sous la chaleur de cette fin de journée. Je sais pas si c’est ça qu’il n’a pas aimé vu que j’ai rien compris … En effet, il a commencé à me prendre de haut et à me déblatérer tout un laïus dont le principal terme était « velocidad ». Devant mon air ahuri, il me redit « velocidad ». Là, je me dis, je vais jouer au con qui ne comprend rien, je gonfle mes deux joues et fait un « Pfffrrrr » … À bien y réfléchir, c’est peut-être ça qu’il n’a pas aimé. Ou alors, le petit rajout du  « no parlo español » avec l’œil de chat potté qui devait à coup sûtr m’assurer la plus grande mansuétude du brave homme. Bon, il n’était pas brave du tout et il me balance une bolleta dans la gueule le bâtard. Sans explication ni rien. D’un autre côté, je comprenais rien donc ça n’aurait pas aidé. Je le suis pour lui donner l’argent et là, il commence à me regarder de travers, genre j’essaye de le soudoyer … Il me rabroue et, là, il a de la chance que je ne parle pas espagnol car j’étais à deux doigts de lui expliquer ma façon de penser sur l’accueil touristique dans ce pays, entre Panama City, San Blas et radars dans un pays sous-développé. Il refuse tout net mon argent (50$ tout de même), se drapant sa dignité de fonctionnaire . Ceci dit, je me permets de lui faire remarquer, en anglais, que la maîtrise d’une deuxième langue serait souhaitable vu le nombre touristes qui doivent se faire racketter. Bon, je n’en rajoute pas, je ne tiens pas à finir à Guantanamo avec FX et je pars avec ma boletta et mes 50$, sans trop comprendre quoi faire, et maudissant ce pays, moi qui n’ai jamais pris une prune hors stationnement dans aucun pays du monde y compris la France. On décide de faire un stop pour ne pas rajouter la fatigue au plan lose de la journée. On se trouve un petit hôtel avec un parc aquatique où les enfants peuvent se régaler en cette basse saison. On cherche sur internet et on découvre qu’on doit aller payer dans un bureau du ministère du tourisme de la province … Me voilà armé de mon espagnol rudimentaire parti à la recherche d’un bureau improbable, ma boleta à la main, Waze dans l’autre et pas certain de comment on s’y prend. Je m’aventure seul dans les faubourgs de la ville du coin, afin de ne pas entraîner les enfants dans cette galère. Et personne ne parle anglais dans ce pays ! Je finis par trouver un prêtre, alleluyah, qui me remet sur le droit chemin, je finis par payer et me dire qu’on ne m’y reprendrait plus.

On reprend la route et je comprends que la police sort surtout vers 10 h et vers 17-18h. La technique est simple : Waze, appel de phares, se caler derrière un poisson-pilote … FX, tu serais hyper fier de moi ! C’est vraiment des zozos parce que en dehors des zones avec des flics, ça roule à 150 à l’heure et j’avais du mal à suivre le rythme de mes camions poisson-pilotes. La route est cependant assez jolie et on arrive dans une région montagneuse en arrivant vers Boquete. La température est descendu de 10 degrés et nous nous retrouvons dans une pension de famille au cœur de la montagne. Après une pizza locale et une promenade au sein de cette ville assez mignonne entre station de montagne, ville touristique et authentique village panaméen.

un poisson pilote roulant à 120 km/h chargé à ras bord !!

Le lendemain, nous partons pour le fameux chemin de randonnée du « El Sendero de los Quetzales » afin de pouvoir observer des quetzals, ces oiseaux  symboles du Panama par leur magnifiques couleurs. Malheureusement, Baptiste nous fait sa tourista habituelle et vomit le long du chemin de rando que les filles vont devoir faire seules. Je tente de prendre soin de mon loulou qui est au plus mal, au fin fond de la montagne, tout en n’ayant aucun moyen de joindre les filles. L’inquiétude grandit quand je vois des gardes revenir du chemin armés jusqu’au dent … Je ne pense pas que c’est pour veiller sur les quetzals et donc je me prends à imaginer des scénarios improbables sur ma femme et ma fille enrôlées dans une guérilla marxiste ou servant d’otages pour demander le retour d’Hollande au pouvoir afin de lutter contre la sécheresse. Les filles finissent par revenir sans avoir vu de quetzals mais, effectivement pas rassurées de se retrouver seules en pleine jungle.

Sur le chemin du retour, on se confronte à la réalité de ce pays où les inégalités sont abyssales. Alors que Baptiste vomissait, un groupe de 7 ou 8 enfants, tous de la même famille, nous observait de loin  à partir du jardin d’une petite maison à une seule pièce blottie dans la montagne. Leur sourire, leur joie en voyant notre salut et en entendant notre klaxon nous a rappelé que le développement apparent de ce pays ne touche pas tout le monde. Les paysages traversés et la gentillesse locale nous a réconcilié avec ce pays qui nous avait un peu déçu jusque-là.

Notre séjour à Boquete se termine avec quelques promenades dans cette région montagneuse qui ressemble beaucoup au Costa-Rica puis nous partons pour le centre du pays et la côte pacifique. C’est une région très peu touristique, assez isolée et où nous avons trouvé un petit hôtel constitué de petits bungalows en terrasse à l’aplomb d’une crique, à l’abri de la jungle. C’était un endroit magnifique avec ses singes hurleurs et sa flore préservée. Nous y avons passé 3 jours merveilleux entre randos et farniente. 

Cela a clos notre voyage au Panama avec un retour vers 2h du matin pour reprendre les cours à 8 h le lendemain pour toute la famille. Ce voyage nous a laissé une impression mitigée avec des endroits magnifiques, mais aussi un vrai gâchis devant les dégâts du développement économique anarchique et de l’appât du gain autour de la manne touristique. Nous avons heureusement trouvé un peu d’authenticité et beaucoup plus de douceur sur la deuxième partie de notre séjour ce qui a contrebalancé ce sentiment négatif. Le Panama est un joli pays avec une nature luxuriante et une météo parfaite en février mais on pense vraiment qu’il y a bien mieux en Amérique Centrale. Nous essayerions bien la Colombie prochainement mais il va peut-être falloir nous mettre à l’espagnol un de ces 4 ;).

Petit jeu bonus avec, à la clé, un voyage au Panama à gagner  :

À part FX bien sûr, qui connaît la signification de ce panneau ?

One Reply to “Panama paper”

  1. Tu voooooooois que ça sert le coloriage !!!!!!! : )) super article j’ai bien rigolé… Tu abuses quand même franchement l’espagnol c’est pas compliqué hein 😋

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