Il y a un moment que je n’avais pris mon clavier pour vous conter nos péripéties. Non pas qu’il ne se passe rien, bien au contraire, puisque le Liban a ceci de remarquable qu’on ne s’ennuie jamais, mais j’attendais de trouver le petit déclic, cette anecdote qui tue et dont le Liban a le secret … C’est arrivé la semaine dernière, l’air de rien, puis il m’a fallu le temps de me remettre de ma sidération. Mais reprenons le cours du temps : depuis mon dernier article et avant les vacances en France, Baptiste a eu son bac avec les honneurs et Elise a bravé l’oral de français et s’en est bien sortie (à l’écrit un peu moins, comme son père … ) . Nous avons eu droit aux émouvants adieux aux études secondaires lors de la traditionnelle graduation, à l’anglo-saxone puis le fameux bal de promo pour lequel les élèves se préparent pendant un an.

nos enfants avec leur amoureux/se

Après ces beaux moments, j’ai fait mes premiers pas sur scène pour deux représentations de La cantatrice chauve, non sans une certaine appréhension. Heureusement, tout s’est bien passé et le succès a été au rendez-vous 🥳 malgré une pièce dont l’absurdité a été poussée à son paroxysme avec 13 acteurs au lieu des 6 initiaux . Vous pouvez voir ici une captation imparfaite de notre représentation devant les élèves, si le coeur vous en dit .

Je ne résiste pas à la fierté de vous partager la critique de la presse nationale francophone libanaise dans l’Orient le Jour (l’équivalent du Monde ici), un poil exagéré à tel point qu’on a soupçonné le journaliste d’être un ancien amant de notre metteuse en scène 😂 (ce qu’elle dément formellement) :

Après ces évènements chargés en émotion, nous avons passé deux mois intenses en France entre amis et famille, stage de parapente et rendez-vous médicaux, entre anniversaire de mariage de Cathia et Carl et 80 ans de ma maman, entre IKEA et le bon coin pour aménager l’appartement de Baptiste dans la canicule étouffante de cet été … Et oui, nous vivons pour la première fois cette étape décisive dans la vie de parents qu’est l’envol de l’oisillon.En l’occurence, il s’agit d’un bon gros oisillon… Baptiste a choisi de poser ses valises à Lyon, en première année de médecine. Nous sommes admiratifs de l’engagement dont il fait preuve depuis la mi-août et de l’exigence inouïe dont il doit faire preuve pour avoir une petite chance d’intégrer la cohorte de 2nde année, sans le droit au moindre redoublement depuis cette fichue réforme. Nous avons été confrontés à la stressante recherche d’un logement à Lyon après la non-moins stressante attente de Parcours Sup, et cette expérience d’appartements qui partent comme des petits pains à flux tendu et du mépris étonnant des agences immobilières qui n’ont qu’à se baisser pour trouver des clients . Heureusement, nous avons fini par trouver une agence sérieuse et un appartement de deux pièces disponible à 10 minutes en bus de la fac de médecine au sud de Lyon.

Seul hic, le logement était non meublé donc on a passé une semaine au début du mois d’août avec Marie, Elise et son copain venu la rejoindre depuis le Liban car elle lui manquait trop, à faire des aller et retour à Ikea et à découvrir les environs à la poursuite des annonces le bon coin.

Vous avez bien lu, Baptiste n’était pas parmi nous car il était rentré au Liban pour dire au revoir à tous ses amis pendant ce temps-là, le petit malin … On a réussi à lui faire un petit nid douillet pour lui permettre d’affronter au mieux sa rentrée, mais cela ne nous a pas empêché de le maudire en pleine canicule.

Auparavant, on a profité de chouettes moments à 4 parmi la famille et les amis, puisqu’on mesure à quel point ils sont précieux, le temps faisant son oeuvre…

À titre plus personnel, j’ai profité de cet été pour me remettre au parapente, en montagne cette fois , à l’abri des Ecrins. De belles sensations et une préparation pour pouvoir un jour devenir autonome et voler au Liban.

En m’attendant, Elise et Marie ont fait une petite tyrolienne de 2 km avec des pointes à 150 km/h ! Cette semaine à la montagne, au frais, nous a fait le plus grand bien avant de retrouver la touffeur du Liban.

Déco avec vue sur Gap au loin …
atterrissage quelques 20 minutes plus bas

Ce très bel été même si nous n’avons pas pu vous revoir tous, et les derniers doux moments entourés de nos amis et parents, ont rendu le départ vers le Liban particulièrement pénible. Savoir que nous rentrions pour la fournaise de Beyrouth en cette fin d’été et dans ce quotidien toujours incertain au milieu de cette crise interminable, et l’idée de laisser notre fils en France avec un sacré défi devant lui, a créé un vrai vague à l’âme, un peu atténué par l’envie d’Elise de retrouver sa maison et ses amis.

Nous ne nous étions pas trompé, il a fait une chaleur écrasante avec entre 30 et 34 degrés quotidiens mais surtout une humidité infernale. Beyrouth est déserte en cette période car tous ceux qui le peuvent vont profiter de la fraîcheur de la montagne. Du coup, on s’est laissé tenter par une rando de nos potes Jacques et Marjo tout au nord du Liban en espérant une température plus clémente et peut-être la fraîcheur d’une cascade … mais quelle connerie ! On est tombés dans un traquenard en pleine chaleur de midi, avec 1500 mètres de dénivelé, et à peine un petit cours d’eau maigrichon croisé par ci par là. C’est dommage, car sans la menace d’une déshydratation avancée, la balade est magnifique, au milieu des nombreux monastères historiques accrochés à la montagne, un peu comme les Météores grecs, dans le prolongement de la vallée de la Kadisha et son lac Chouwen aux couleurs azur que nous irons découvrir au printemps, lorsque les fleurs innondent la vallée de leur odeur(ça c’est sur la to do list).

Je vous mets une photo pour vous inspirer, mais elle n’est pas de moi.

Les quelques photos de la rando n’ont pas à rougir de la comparaison mais ça manquait un peu d’eau à mon goût 😁

Ces paysages paisibles contrastent avec la situation sociale toujours aussi dramatique. Les titres entêtants qui trustent les journaux laissent peu de place aux doutes : le peuple souffre et veut son argent confisqué par les banques. Voilà pourquoi les hold-up se multiplient dans les agences aux quatre coins du pays, mais sans violence et sans viser d’autres commerces. Les gens ne s’attaquent pas aux agents de change aux coffres pourtant bien remplis, car ce serait du vol, ils braquent leur banque pour qu’on leur donne l’argent qui est sur leur compte. Et tous les libanais spoliés rêvent d’avoir ce courage donc il n’y a pas de sanction sous la pression populaire. Ce pays est paradoxal car il n’y a aucune insécurité dans les rues et les gens restent doux et agréables. Tout fonctionne ici de manière unique. On a été vivre un moment incroyable avec Marie la semaine dernière en nous rendant au service des immatriculations et des permis . En effet, notre ANTS (service des permis français) refuse de reconnaître le permis de Baptiste sans un papier qu’on ne trouve pas ici. Après ce refus, on retente le coup par nos proprios qui ont le bras long. Rendez-vous obtenu avec la directrice des services des transports et là, on a halluciné !

On se retrouve dans des locaux un peu miteux avec une fourmilière de gens agglutinés dans une organisation qu’on ne comprend pas. On a notre sauf-conduit en appelant la directrice et en montant directement dans son bureau. On nous trimballe de bureaux en bureaux avec le même capharnaüm partout mais on découvre surtout avec stupeur une rangée de guichets avec des opératrices collant des timbres (2000 LL pour la demande soit 5 centimes au cours actuel de la livre) et qui stockent les dossiers derrière elles. On a volé une photo tant c’était incroyable … des montagnes de papier qui s’empilent inexorablement !!

La question est : qui va trier ça ? Personne je pense mais cela peut servir de chauffage l’hiver …

En parlant d’énergie, les nouvelles venues de France nous rappellent furieusement notre quotidien. Nous envisageons d’ouvrir une entreprise d’UPS (les batteries sans lesquelles il est impossible de vivre ici en ce moment) pour faire fortune en France quand les coupures d’électricité mettront les ascenseurs et les modems en panne. Nous ne le souhaitons pas bien entendu mais il faut se préparer à vivre avec, même si c’est pénible. Le plus important : caler ses heures de retour à la maison sur les moments où il y a de l’électricité pour éviter de monter 19 étages à pied. De notre côté, on a la chance d’avoir de l’électricité 24h/24 avec quelques petites coupures mais les compteurs individuels nous contraignent à faire très attention pour ne pas payer une fortune en générateur comme certains appartements de notre immeuble, c’est donc une restriction en clim et en ballon d’eau chaude, les plus énergivores. Quoiqu’il en soit, l’électricité est une préoccupation constante de chacun au Liban et il nous paraît de voir cela arriver en France… Cela me rappelle un docteur croisé lors d’une soirée à qui je demandais ce qu’il pensait de la situation et qui m’a répondu que le Liban avait 50 ans d’avance sur le monde. À quelques détails près, en termes de gestion et de sens commun tout de même, comme l’illustre merveilleusement ce petit papier reçu la semaine dernière :

Malgré les nombreuses qualités des lecteurs de ce blog, triés sur le volet, j’imagine que la lecture de l’arabe n’est pas votre point fort. Alors sachez qu’il s’agit d’une facture dl’EDL (Electricité du Liban) pour notre consommation. Vous devez vous étonner que cela nous surprenne… ben oui, c’est notre première ! Elle est pour notre consommation des mois d’octobre, novembre et décembre 2020 ! On en a pleuré de rire !! Avec une entreprise aussi bien gérée, les générateurs privés ont de l’avenir !

Je crains que vos factures d’EDF ne vous arrivent un peu plus vite malheureusement (ou heureusement pour l’entretien de nos centrales … ). D’ici là, n’oubliez pas de couper votre ballon d’eau chaude et de mettre un col roulé !

On vous embrasse et à très bientôt

4 Replies to “De la sueur et des larmes”

  1. Merci Matthieu pour cet article encore une fois truculent.
    Baptiste va être très occupé par ses études, mais j’espère qu’il n’a pas laissé tomber le rugby !! Il y a un bon club à Lyon….
    Ici à SF, pas mal de turnover en Maths et je reste le seul que tu connaisses… La mort dans l’ame, Quentin est parti a Montreal . Je continue à faire tourner ton bébé MEJ qui marche bien et qui a résisté à la crise du Covid. Bonne ambiance au lycée depuis que mon amie C Riez nous a quitté. Son successeur est vraiment top :en plus, il aime le foot et m’a concocté un EDT champions league (pas de cours le Mardi et Mercredi apres midi). La famille va bien aussi, Brodie est aussi gd que moi et est en 3eme maintenant. Max le rejoindra a Ortega l’annee prochaine. Natasha a toujours le Daycare, avec le lycee qui lui fournit une partie de sa clientele.
    Bisous a tous les 4 !!

  2. Coucou les gars !
    ça fait plaisir d’avoir de vos nouvelles. En plus d’une pierre deux coups !
    C’est bizarre de voir le temps passer, de voir les enfants des autres suivre les étapes de la vie : entrée à Ortega, installation sur le lieu des études avec les parents qui passent un été à déménager/emménager.
    J’espère que Baptiste sera aussi heureux à Lyon que Camille, qui a fait des études intenses mais très productives à l’école Émile Cohl.

    En parlant d’oisillons qui quittent le nid. Camille est désormais « dessinatrice conceptrice » et a publié un premier boulot sur la matinale (elle illustre un scénario écrit pas quelqu’un d’autre) Instagram de Dargaud : Matin_queljournal :
    Voici le lien direct : https://www.instagram.com/p/CjPUBV0oqSo/
    Au cas où, son nom de code instagram est Camchtok.
    J’ai conscience que ça va être très difficile pour Nicolas : avec un téléphone à clapet, je pense qu’Instagram c’est mort !
    Ici tout va bien, il y a beaucoup de boulot parce que la réforme du lycée atteint cette année les deuxièmes années de prépa… Mais je ne vais pas me plaindre, j’ai un super-boulot.
    Je vous embrasse tous, avec vos familles respectives à la clé.
    Miguel

  3. Coucou les schav, l’été fut donc chaud chaud. Retour au habitude de travaux, au fait il reste combien de pièces en trop. Car comme tu n’es pas blond tu as du te retrouver avec le petit bocal de pièces en trop de chez IKEA
    Pour la blondeur de chauve, 1h 30!de visionnage, ma pendule a sonné la fin avant
    Bon courage avec seulement la petite à gérer
    Bisoux à vous 3+1 et on se voit vite
    Thierry

  4. Toujours un plaisir de te lire et de voir vos têtes.
    Le théâtre enfin. J’aurais voulu voir ça.
    Bises. Amélie

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