Jusqu’au bout !

On aurait quand même pu se douter que la dernière saison ne pouvait se terminer de manière aussi placide, avec quelques attaques hebdomadaires de drones et un missile sur Beyrouth de temps à autre. Il fallait un rebondissement à la hauteur de ces cinq dernières années pour clôturer la parenthèse libanaise.

Nous avions bien avancé les préparatifs de départ et même entamé le compte à rebours rituel des « dodos » nous séparant des retrouvailles avec nos loulous (15 au moment où j’écris ces lignes) que nous voici à nouveau rattrapés par l’actualité.

En même temps les scénaristes se sont une fois de plus surpassés, même s’ils ont un peu pompé sur le scénario de « Minority Report » avec cette histoire de riposte à une attaque pas encore arrivée dans le présent…

Du coup, espace aérien fermé, vols annulés en pagaille, ciel qui s’illumine avec les passages des missiles dans un sens puis dans l’autre offrant aux fêtards libanais une version de feu d’artifice pour le moins innovante.

Malgré ces rebondissements nous profitons bien de ces derniers moments au Liban. Nous avons pu découvrir le centre de Beyrouth, qui était jusqu’à peu inaccessible car barricadé depuis la thaoura (révolution). Beaucoup de ruines romaines s’y trouvent dont des thermes plutôt bien conservés.

Nous sommes retournés à Batroun et Byblos pour profiter de l’air un peu moins pollué et surtout du calme du bord de mer, ainsi que dans le Chouf. Effectivement le drone a fait son retour et revient nous saper les oreilles et le moral quotidiennement.

Le timing de ces 2 dernières semaines est bien tendu avec l’arrivée espérée dimanche prochain de Jacques et Marjo qui reviennent de Dakar pour partager avec nous ces derniers moments libanais, des soirées de départ en pagaille, une représentation de théâtre et un mariage chiite. Et oui, les plus calés d’entre vous en géopolitique admireront notre sens du timing. A l’heure où le Hezb menace de revenir dans la partie si les Américains interviennent, participer à un mariage chiite nous paraissait une expérience unique.

Celles et ceux d’entre vous qui auront réussis à venir nous rendre visite entre les crises sanitaire, sécuritaire, politique et la guerre, se seront certainement vus poser cette question dès même leur arrivée sur le sol libanais : « Tu as aimé le Liban ? »

Question ô combien difficile, et ce non seulement à cause de l’emploi douteux que font les Libanais du passé composé.

Je garderai un sentiment mitigé de ce pays qui n’incite pas à une neutralité des sentiments mais suscite des sentiments forts, souvent contrastés et turbulents.

Il y a une semaine, j’aurais écrit que nous quittons un pays où il y a enfin un souffle d’espoir après la mise en place d’un gouvernement qui semble remettre un peu d’ordre dans le pays dont les effets sont visibles au quotidien. Les Libanais étaient plus optimistes et voulaient être positifs quant au futur.

Aujourd’hui c’est surtout la colère qui domine de voir le grand gâchis que les uns et les autres ont fait de ce pays. Le Liban devrait être paradisiaque avec son climat agréable, ses habitants généreux et ses paysages variés. Malheureusement la pollution, la saleté, le trafic insupportable à toute heure de la journée et le bétonnage à outrance sans parler du voisin génocidaire font que nous comptons les jours qui nous séparent de notre retour. Jours qui peuvent s’allonger en fonction des événements des jours prochains, Air France ayant annulé ses vols.

Je finirai sur ces mots très justes du journaliste Anthony Samrani :

« La fin de l’ère Iranienne est une bénédiction pour le Moyen-Orient. Mais ne nous faisons aucune illusion : le début de l’ère israélienne est bien une malédiction »